En fanfare

"En fanfare" est avant tout l'histoire de deux frères séparés par tout, malgré une origine commune. Et c'est "musicalement" qu'Emmanuel Courcol a cherché à les réunir. Thibaut Désormaux est un chef d'orchestre et compositeur parisien avec une carrière internationale. Jimmy Lecocq travaille dans une cantine scolaire et joue du trombone dans la fanfare de Walincourt, une petite ville fictive du Nord.
La musique du film est le reflet d'un monde pluriel, où les barrières entre les genres et les publics ne forment plus des partitions étanches. Il y a d'abord le grand monde de la musique classique, qui est celui de Thibaut Désormaux. Elle ouvre et ferme le film, avec l'Ouverture d'Egmont de Beethoven et le Boléro de Ravel. On entend également le Concerto 23 de Mozart, les Hébrides de Mendelssohn... Puis il y a le monde des fanfares et des bandas, celui de Jimmy Lecocq, le frère cadet, représenté par la Marche Triomphale d'Aida ou When the Saints Go Marching In... Les frères découvrent finalement qu'ils ont en commun non seulement un sens absolu de la musique, mais aussi une fibre créative. Ainsi, Quadrature est une œuvre symphonique contemporaine et exigeante, que l'on voit Thibaut composer et qui sera interprétée à la Seine Musicale, dans la scène finale du film. Jimmy compose également, et les crédits du film sont sa Valse pour Thibaut écrite pour son frère et présente sur le disque sous forme orchestrale, piano solo et fanfare.
Entre ces trois centres musicaux — classique, fanfare et création — il y a des passerelles, comme le jazz ou la chanson française. Des passerelles aussi entre les mondes professionnels et amateurs.
Que les ouvriers d'une usine s'approprient le Boléro de Ravel, inspiré en partie par le rythme mécanique de l'industrie naissante, qu'un musicien classique redécouvre la dimension humaine dans la musique populaire, que l'échange sur le langage musical entre un professionnel et un amateur nous permette de voyager de Verdi au jazz — tout cela fait d'"En fanfare" une œuvre porteuse d'une question sociétale essentielle sur le vivre-ensemble qui dépasse largement le cadre du divertissement.
Une fable musicale sur fond de déterminisme social, "En fanfare" cherche un espace de partage fraternel et de découverte mutuelle à travers le langage universel de la musique, qui relie deux mondes étrangers mais complémentaires. En ce sens, la scène chorale finale, qui unit orchestre symphonique, fanfare et public dans le même esprit, suggère que les pratiques musicales amateurs qui irriguent les territoires les moins privilégiés peuvent revendiquer le même titre de noblesse que la "grande musique".
"En Fanfare" - (The Marching Band)
Réalisé par Emmanuel Courcol
Musique originale : Michel Petrossian
Avec l'Orchestre National d'Ile-de-France et l'Harmonie des mineurs de Laillang
Label : Plaza Mayor Company Ltd